Mois : juin 2025

Chemin rural – Cession d’un chemin rural faute d’affectation à l’usage du public – Veille

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Droit rural n° 6-7, Juin-juillet 2025, alerte 56

Cession d’un chemin rural faute d’affectation à l’usage du public

CAA Versailles, 4e ch., 29 avr. 2025, n° 23VE00943 : JurisData n° 2025-007131

N’est plus affecté à la circulation générale et continue du public, donc peut être aliéné, le chemin dont l’unique objet est de permettre à un riverain d’accéder à sa propriété.

Un exploitant agricole a demandé l’annulation d’une délibération d’un conseil municipal autorisant la vente d’un chemin rural à des particuliers. Le chemin rural fait, en effet, partie du domaine privé de la commune et peut être aliéné dans la mesure où il cesse d’être affecté à l’usage du public (C. rur., art. L. 161-1 et L. 161-10). Or, c’est sur le fondement de cette dernière condition que le requérant demandait l’annulation de la décision d’aliénation. Il soutenait, en effet, que le chemin rural en cause était toujours affecté à l’usage du public dès lors qu’il s’en servait de voie de passage pour ses engins agricoles.

Pour rejeter sa requête, la cour administrative d’appel s’est appuyée sur les pièces du dossier produites en première instance : il s’agissait en fait d’une impasse permettant à des riverains, qui se chargeaient de l’entretien du chemin, d’accéder à leur propriété. Elle ne portait du reste aucune empreinte d’engins agricoles.

Cela étant, même si les arguments du requérant n’avaient pas été contredits par les éléments du dossier fourni, il n’aurait pas pu obtenir l’annulation de la délibération litigieuse. Le fait de faire circuler ses propres engins agricoles sur le chemin n’est pas de nature à faire regarder ce chemin comme affecté à la circulation générale et continue. Le chemin n’était donc plus affecté à l’usage du public.

Mots clés : Chemin rural. – Défaut d’affectation. – Circulation engins agricoles.

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Prorogation du bail rural – Évaluation du régime applicable pour déterminer la validité d’un congé de reprise dans le contexte d’un bail rural – Focus

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Droit rural n° 6-7, Juin-juillet 2025, alerte 44

Évaluation du régime applicable pour déterminer la validité d’un congé de reprise dans le contexte d’un bail rural

Cass. 3e civ., 7 mai 2025, n° 22-16.518, FS-B : JurisData n° 2025-006369

Il résulte de l’article L. 411-58, alinéas 4 et 6, du Code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2006-870 du 13 juillet 2006, que, s’il apparaît, fût-ce rétrospectivement, qu’à la date d’effet du congé, la reprise n’était pas soumise à autorisation, le sursis à statuer qui aurait cependant été prononcé n’a pu entraîner la prorogation du bail et, par suite, le report de la date d’appréciation des conditions de la reprise.

C’est ce qu’a jugé la Cour de cassation dans un arrêt du 7 mai 2025.

En l’espèce, des propriétaires de parcelles données à bail ont délivré au preneur un congé pour reprise aux fins d’exploitation par leur fils. Le preneur a saisi un tribunal paritaire des baux ruraux en annulation du congé. Un sursis à statuer a été ordonné dans l’attente d’une décision définitive des juridictions administratives statuant sur le recours formé par l’exploitation agricole à responsabilité limitée (EARL), gérée par le fils des propriétaires, à l’encontre de la décision préfectorale, refusant de lui délivrer une autorisation d’exploiter. Un arrêt d’une cour administrative d’appel a définitivement rejeté la requête de l’EARL.

C’est en vain que le preneur fait grief à l’arrêt d’appel (CA Rennes, 5 mai 2022, n° 20/06350 : JurisData n° 2022-012259) de valider le congé pour reprise.

Selon l’article L. 411-58, alinéas 4 et 6, du Code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2006-870 du 13 juillet 2006, si la reprise est subordonnée à une autorisation en application des dispositions du titre III du livre III relatives au contrôle des structures des exploitations agricoles, le tribunal paritaire peut, à la demande d’une des parties ou d’office, surseoir à statuer dans l’attente de l’obtention d’une autorisation définitive. Lorsque le sursis à statuer a été ordonné, le bail en cours est prorogé de plein droit jusqu’à la fin de l’année culturale pendant laquelle l’autorisation devient définitive. Si celle-ci intervient dans les 2 derniers mois de l’année culturale en cours, le bail est prorogé de plein droit jusqu’à la fin de l’année culturale suivante.

La Cour de cassation approuve, au visa de cet article, les juges du fond d’avoir fait ressortir que le sursis à statuer qu’ils avaient précédemment ordonné n’avait pas entraîné la prorogation de la durée du bail et donc le report de la date d’appréciation des conditions de la reprise, dès lors qu’il apparaissait, rétrospectivement, que la reprise n’était pas soumise à autorisation.

Pour le juge du droit, la cour d’appel s’est, à bon droit, placée à la date d’effet du congé pour apprécier sa validité, sans heurter l’autorité de la chose jugée attachée à la décision du juge administratif, qui n’avait pas le même objet et ne concernait pas les mêmes parties.

En effet, l’article L. 331-2, II, du Code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction antérieure à la loi d’avenir pour l’agriculture du 13 octobre 2014, prévoyait qu’était soumise à déclaration préalable la mise en valeur d’un bien agricole de famille lorsque trois conditions étaient remplies. Cette loi a ajouté une quatrième condition tenant à un seuil de surface fixé par le schéma directeur régional des exploitations agricoles. En l’espèce, ce seuil a été fixé par un arrêté du préfet de la région Bretagne. Les conditions du régime applicable au contrôle des structures devaient donc être appréciées à la date à laquelle le congé devait prendre effet. Si, à cette date, la loi du 13 octobre 2014 était applicable, le schéma directeur n’était pas fixé, de sorte que la quatrième condition n’était pas déterminée à cette date et était inapplicable au fils des propriétaires. Dès lors la cour d’appel, relevant que ce dernier remplissait les trois premières conditions pour bénéficier du régime dérogatoire de la déclaration, en a exactement déduit que la reprise du bien loué n’était pas subordonnée à une autorisation d’exploiter.

À retenir : si la reprise s’avère rétrospectivement non soumise à autorisation à la date d’effet du congé, le sursis à statuer n’a pas prorogé le bail et la date d’appréciation des conditions de reprise reste celle de l’effet du congé.

Mots clés : Prorogation du bail rural. – Conditions de reprise du bail rural. – Sursis à statuer.

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