Catégorie : cession

Conditions de résiliation du bail rural en cas de mise à disposition des biens loués à une société ou un groupement

Trois arrêts publiés le même jour illustrent que la participation active et continue des locataires à l’exploitation des biens loués est essentielle pour éviter la résiliation du bail, même si les biens sont mis à la disposition d’une société ou d’un groupement dont ils ne sont pas membres. Le bailleur doit prouver que le manquement lui cause un préjudice pour obtenir la résiliation du bail.

Ainsi, dans l’un de ces arrêts (n° 23-13.893), la Cour de cassation juge que lorsqu’un locataire, ou en cas de cotitularité, l’un des locataires, met les biens loués à la disposition d’une société dont ils ne sont pas associés, mais continuent à participer activement et de manière permanente aux travaux sur place, ils ne cèdent pas la jouissance du bien loué à cette société. Par conséquent, le bailleur ne peut demander la résiliation du bail que sur la base de l’article L. 411-31, II, 3°, du Code rural et de la pêche maritime, et doit prouver que le manquement lui cause un préjudice.

Dans une situation similaire à la première (n° 23-12.967), si un des cotitulaires du bail cesse de participer à l’exploitation du bien loué, le cotitulaire restant dispose de trois mois pour demander au bailleur, par lettre recommandée avec accusé de réception, que le bail se poursuive à son seul nom (V. art. L. 411-35, alinéa 3, du même, dans sa rédaction issue de la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014). Le propriétaire ne peut s’y opposer qu’en saisissant le tribunal paritaire dans un délai de deux mois. Le juge, saisi de l’opposition du bailleur, doit alors statuer en tenant compte des intérêts légitimes du bailleur, notamment la capacité du cotitulaire restant à assurer la bonne exploitation du bien et à respecter ses obligations légales et contractuelles.

Dans le troisième et dernier arrêt (n° 23-14.685), la Cour retient que lorsque les biens loués sont mis à la disposition d’un groupement agricole d’exploitation en commun (GAEC) dont les locataires ne sont pas membres, mais qu’ils continuent à participer activement et de manière permanente aux travaux sur place, ils ne cèdent pas la jouissance du bien loué à ce groupement. Ainsi, le bailleur ne peut demander la résiliation du bail que sur la base de l’article L. 411-31, II, 3°, du Code rural et de la pêche maritime, et doit prouver que le manquement lui cause un préjudice.

En synthèse, ces décisions affirment le principe suivant : tant que les locataires continuent à participer activement à l’exploitation des biens loués, même s’ils les mettent à disposition d’une société ou d’un groupement, ils conservent leurs droits de locataires et le bailleur ne peut pas résilier le bail sans motif légitime.

La Cour souligne que la participation active et permanente des locataires aux travaux sur les biens loués est essentielle pour éviter de considérer qu’il y a cession de la jouissance du bien au profit de la société ou du groupement. Cette participation directe démontre que les locataires conservent le contrôle de l’exploitation des biens. Si les locataires respectent cette condition de participation active, le bailleur ne peut pas résilier le bail librement. Il doit invoquer un motif précis prévu par la loi, à savoir un manquement du locataire qui lui cause un préjudice. La simple mise à disposition des biens à une société ou à un groupement ne suffit pas à justifier une résiliation.

Source

Cass. 3e civ., 26 sept. 2024, n° 23-13.893, FS-B

Cass. 3e civ., 26 sept. 2024, n° 23-12.967, FS-B

Cass. 3e civ., 26 sept. 2024, n° 23-14.685, FS-B

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Assimilation de l’association d’un membre de sa famille au bail rural à une cession

Obs. sous Cass. 3e civ., 11 juill. 2024, n° 22-22.156

Solution. – La faculté d’associer un membre de sa famille au bail en qualité de copreneur, prévue à l’article L. 411-35 alinéa 2 du Code rural et de la pêche maritime, est réservée au preneur de bonne foi, c’est-à-dire à celui qui s’est acquitté de toutes les obligations légales ou conventionnelles résultant de son bail. La condition de bonne foi est appréciée à la date de la demande en justice d’autorisation d’association. Il résulte des articles L. 331-2 et L. 411-35 alinéa 2, du Code rural et de la pêche maritime que l’autorisation par le tribunal de l’association d’un membre de la famille au bail en qualité de copreneur est subordonnée à la conformité de la situation au contrôle des structures.

Impact. – La Cour de cassation, pour la première fois, par le présent arrêt, précise que l’association d’un proche, tout comme la cession intrafamiliale, en tant qu’exception au principe d’incessibilité du bail rural et à son caractère intuitu personae, est une faculté réservée au preneur de bonne foi, c’est-à-dire celui qui s’est acquitté de toutes ses obligations légales ou conventionnelles. Elle ajoute, par analogie à la cession intrafamiliale, que l’autorisation de l’association d’un proche au bail rural est conditionnée au respect par ce dernier des exigences du contrôle des structures.

L’exception du cadre familial. Le bail rural est conclu en considération de la personne. Il est dépourvu d’une valeur patrimoniale. Par exception au principe d’interdiction des cessions, et sous certaines conditions, le preneur peut céder son titre à son conjoint ou partenaire pacsé ou à ses descendants ou encore associer ces mêmes personnes à son bail (C. rur., art L. 411-35). Cette disposition « est destinée à permettre une transition avant la retraite effective du preneur en place » (J.-F. Le Petit, « L’interdiction de céder ou de sous-louer un bail rural et ses exceptions progressives », Administrer, août-sept. 1998, p. 26). 

L’association d’un proche au bail et la cession ont, très souvent, été abordée ensemble, voire indistinctement (V. contra S. Pringent, Répertoire de droit immobilier Dalloz, v° Bail rural, n°390, qui sans aborder indistinctement l’association au bail et cession admet que « [la première] opération suppose une autorisation concédée dans les mêmes conditions que pour les cessions familiales »). Cependant ce n’est qu’en matière rurale que ce rapprochement est opéré. La cession de contrat, telle que définie civilement (C. civ. art. 1216), se distingue de l’association au bail, laquelle n’opère pas une substitution de preneurs mais l’adjonction d’un nouveau preneur au preneur existant.

La Cour de cassation par un arrêt du 11 juillet 2024, qui a les honneurs d’une publication, a eu l’occasion d’apporter une clarification sur les conditions de l’association d’un proche au bail. Celles-ci sont déterminées par analogie aux conditions de la cession intrafamiliale déjà posées par la jurisprudence (Cass. 3e civ., 21 févr. 1996, n° 94-12.134, Bull. III, n°51, 1996 ; Cass. 3e civ., 5 juin 2002, n° 00-21.893, Bull. III, n°128, 2002). Il apparait toutefois surprenant que les conditions de l’association au bail soient précisées par le récent arrêt, s’agissant d’une disposition usitée depuis plusieurs années (la disposition est insérée dans le Code rural par une loi du 1er août 1984 pour le descendant, une loi du 30 décembre 1988 pour le conjoint et la loi du 5 janvier 2006 opère une extension au partenaire pacsé. V. en ce sens L. Lorvellec et F. Collart Dutilleul, Les baux ruraux, éd. Sirey, 1993, n° 250).

Faits de l’espèce. Par acte du 24 décembre 1959, un domaine agricole est donné à bail à ferme. Le 19 septembre 2011, la bailleresse, invoquant divers manquements des preneurs, leur a délivré congé à effet au 25 mars 2013. Les preneurs ont saisi le tribunal paritaire des baux ruraux en annulation du congé. Ils ont demandé, à titre additionnel, l’autorisation d’associer leur fils ou bail.

Procédure. Le tribunal paritaire des baux ruraux d’Aurillac a annulé le congé délivré par la bailleresse et a autorisé les preneurs à associer leur fils au bail en qualité de copreneur. La cour d’appel de Riom rend, le 27 septembre 2022, un arrêt confirmatif. La baillleresse, demanderesse au pourvoi, fait grief à l’arrêt d’autoriser les preneurs à associer leur fils au bail, alors « que l’association au bail d’un descendant, qui aboutit à pérenniser le bail, est une faveur réservée au preneur qui n’a commis aucun agissement susceptible d’entraîner la résiliation du bail ; que la cour d’appel a constaté que M. [S] [D] avait effectivement quitté l’exploitation pour prendre sa retraite le 1er juillet 2019 et que le bailleur n’avait jamais été informé officiellement de cette situation ; qu’en considérant qu’il ne s’agirait pas d’une faute et en autorisant l’association au bail de [R] [D], la cour d’appel a violé les articles L. 411-31 et L. 411-35 du code rural et de la pêche maritime ».  La bailleresse fait le même grief à l’arrêt alors « que le bénéficiaire de l’association est tenu de respecter les règles du contrôle des structures ; qu’il doit donc selon le cas justifier avoir obtenu une autorisation d’exploiter ou avoir respecté la législation sur les structures agricoles ».

L’autorisation de l’association de membre de la famille au bail en qualité de copreneur est-elle soumise aux conditions de bonne foi du preneur et de régularité de la situation du candidat à l’association au contrôle des structures ? À quelles conditions la cessation d’activité d’un copreneur, sans la réalisation de la formalité prévue à l’article L. 411-35 al. 3 et 4 du Code rural, est-elle susceptible d’entraîner la déchéance de la faculté d’associer un membre de la famille au bail ? L’association au bail est-elle conditionnée à la conformité de la situation du candidat au contrôle des structure et/ou, si les terres sont exploitées dans un cadre sociétaire, à la conformité de la situation de cette société à cette législation ?

La Cour de cassation affirme explicitement que les conditions exigées dans le cadre de l’autorisation judiciaire de la cession intrafamiliale du bail rural sont applicables à l’association au bail d’un proche en qualité de copreneur. Ces conditions tiennent d’une part au respect scrupuleux par le preneur en place des obligations mises à sa charge par le statut du fermage (I) et d’autre part à la satisfaction par le candidat à l’association aux exigences du contrôle des structures (II)

      I-Une assimilation sur le terrain du statut du fermage

L’article L. 411-35 al. 2 du Code rural et de la pêche maritime permet au preneur d’associer à son bail, en qualité de copreneur, son conjoint, son partenaire pacsé ou un descendant majeur. L’opération suppose l’agrément du bailleur, lequel peut être tacite (Cass. 3e civ., 25 mars 2015, n° 13-18.874 ; Cass. 3e civ., 10 oct. 2019, n° 18-17.031). « Si elle n’a pas été autorisée, [l’association] peut être sanctionnée de la même façon qu’une cession occulte : le preneur encourt la résiliation de son bail » (J.-P. Moreau et B. Grimonprez, Jurisclasseur Baux ruraux, Fasc. 320 : Baux ruraux- Droits et obligations du preneur- Exploitation du fonds- Cession de bail et sous-location). L’absence d’agrément peut être suppléée par une autorisation judiciaire. Celle-ci est accordée en considération de la bonne foi du preneur (A), laquelle est appréciée par les juges au moment de la demande (B).

   A-Exigence de bonne foi

Exécution diligente des obligations légales ou conventionnelles. S’agissant d’une demande d’autorisation de cession, la Cour de cassation impose que le preneur soit de bonne foi, c’est-à-dire qu’il se soit acquitté de ses obligations légales et de celles nées du bail. Cette exigence ne découle pas des textes mais est admise depuis fort longtemps en jurisprudence (V. en ce sens Cass. 3e civ., 6 nov. 1973, n° 72-14.717 ; Cass. 3e civ., 30 juin 2021, n° 20-15.343).

Aussi, la haute juridiction, par le présent arrêt, a-t-elle soumise l’autorisation d’associer un proche au bail, en qualité de copreneur, à la condition de bonne foi du preneur. Cette condition est justifiée par le fait que la faculté de cession intrafamiliale tout comme celle d’associer une proche au bail constitue une exception au principe d’incessibilité du bail et son caractère intuitu personae, qui doit être réservée au preneur qui a fait preuve de diligence dans l’exécution de l’ensemble des obligations mises à sa charge par le statut du fermage. Il est vrai, cependant, que l’association d’un membre de famille porte atteinte au caractère intuitu personae du bail rural dans une moindre mesure que la cession. Le bailleur conserve, malgré l’adjonction d’un nouvel exploitant en qualité de copreneur, le preneur qu’il a choisi originairement.

La solution retenue par la Cour de cassation ne s’impose pas avec évidence. Civilement, l’association au bail n’est pas une cession de contrat. Mais l’assimilation des conditions de l’association au bail à celles de la cession trouve une justification en matière rurale, en ce sens que ces deux opérations sont abordées en plein cœur de l’article L. 411-35 du Code rural et de la pêche maritime siège de l’interdiction des cessions et sous-location. L’association au bail demeure une exception au principe d’interdiction des cessions et sous-location. Par conséquent, pour bénéficier de cette exception, le preneur doit scrupuleusement respecter l’ensemble de ses obligations.

La Cour de cassation tient également compte du moment où l’autorisation d’associer un proche au bail est soumise pour apprécier la bonne foi du preneur.

   B-Appréciation de la bonne foi

Antériorité de la faute – même au renouvellement du bail – et déchéance de la faculté d’associer.  La Haute juridiction prend en considération pour autoriser l’association d’un proche au bail, la date de la demande judiciaire. Par le présent arrêt, la Cour de cassation précise que la condition tenant à la bonne foi du preneur s’apprécie au moment de la demande de l’association au bail. Il convient alors de retenir à l’égard du preneur négligent la déchéance de la faculté d’associer un proche au bail, a fortiori, de le céder. Sont suffisants pour justifier le refus d’une association d’un proche au bail – également de la cession – les manquements mêmes antérieurs au renouvellement (Cass. 3e civ., 11 juill. 2019, n° 18-14.783).

La solution apparait sévère, car un manquement quelconque aux obligations conventionnelles ou légales, peu important son incidence à l’égard de la bonne exploitation du fonds et portant relativement atteinte aux intérêts du bailleur, est une cause de déchéance de la faculté du preneur d’associer un membre de sa famille. Cependant, malgré sa sévérité, cette solution a du sens en se plaçant sur le terrain du statut du fermage.

Ainsi, par exemple, l’inobservation par le preneur des formalités d’information du bailleur en cas de cessation d’activité d’un des copreneurs apparait comme un obstacle à l’association d’un proche au bail. Par un arrêt remarqué du 30 novembre 2023, la Cour de cassation s’est prononcée en précisant que les formalités prévues à l’article L. 411-35 al. 3 et 4 du Code rural, ne créent pour le copreneur resté en activité, qu’une simple faculté dont le non-usage ne constitue pas une infraction de nature à permettre une résiliation péremptoire du bail (V. Obs. sous Cass. 3e civ., 30 nov. 2023, n° 21-22.539 FS-B : Agridroit, Quinzomadaire n°2, 18 janv. 2024, par J.-V. Kouassi). Toutefois, cette solution n’empêche pas de supposer que le preneur qui manque de satisfaire aux formalités d’information du bailleur, en cas de départ de son coobligé, s’expose ultérieurement à la déchéance de sa faculté de céder son bail ou d’associer un proche.

Au cas présent, la demanderesse au pourvoi soutient que la cessation d’activité d’un copreneur, sans la réalisation de la formalité d’information prévu à l’article L. 411-35 al. 3 et 4 du Code rural, prive le preneur restant de sa faculté d’associer un membre de sa famille au bail. En effet, il n’était pas contesté que l’époux, copreneur à bail, a quitté l’exploitation pour prendre sa retraite le 1er juillet 2019 et que le bailleur n’a jamais été informé de ce départ. Cependant, quand bien même un manquement aux formalités d’information du bailleur pourrait être caractérisé, les époux-copreneurs échappent aux sanctions prévues par les articles L. 411-35 et L. 411-31, II, 1° du Code rural. La solution est bien établie en jurisprudence, par application de l’article L. 411-46 al. 2 du Code de rural, qui dispose qu’en cas de départ de l’un des conjoints ou partenaires d’un pacte civil de solidarité copreneur du bail, le conjoint ou le partenaire qui poursuit l’exploitation a droit au renouvellement du bail (Cass. 3e civ., 6 juill. 2022, n° 21-12. 833).

L’invocation de l’article L. 411-46 al. 2 du Code rural est salvatrice en l’espèce mais reste une exception. En l’espèce, le manquement à la formalité d’information invoqué par la demanderesse au pourvoi étant intervenu postérieurement à la demande d’autorisation, celui-ci s’avère inopérant.

      II-Une assimilation sur le terrain du contrôle des structures

Le contrôle des structures se déclenche en présence d’une installation, d’un agrandissement ou d’une réunion d’exploitations agricoles (C. rur., art. L. 331-2). Si le preneur est tenu d’obtenir une autorisation d’exploiter en application de l’article L. 331-2 du Code rural et de la pêche maritime, la validité de la cession du bail est subordonnée à l’octroi de cette autorisation (C. rur., art. L. 331-6). Dans le prolongement d’une assimilation à la cession, sur le terrain du statut du fermage, l’association d’un proche au bail peut être subordonnée aux dispositions relatives au contrôle des structures (A). Le présent commentaire ne fait pas l’économie d’une appréciation du bienfondé de l’assimilation de l’association au bail à la cession sur le terrain du contrôle des structures (B).

   A-Conformité au contrôle des structures

Analogie entre l’association au bail et la cession sur le terrain du contrôle des structures. La législation relative au contrôle des structures se déclenche en présence d’opérations d’installation, d’agrandissement ou de réunions d’exploitations agricoles. L’association au bail peut être considérée comme une installation si le proche proposé comme copreneur n’avait pas été jusque là exploitant. A fortiori, si le membre de la famille envisagé pour une association était déjà agriculteur, l’opération peut consister en un agrandissement ou une réunion d’exploitations. Le déclenchement du contrôle des structures, dans le cadre d’une association au bail, se trouve justifié par ces hypothèses.

Ainsi, dans le prolongement de l’analogie initiée sur le terrain du respect des obligations instituées par le statut du fermage, la validité de l’association au bail est soumise au respect par le futur copreneur des exigences du contrôle des structures, tout comme le cessionnaire est tenu.  Le régime de la nullité de la cession en cas de manquement par le cessionnaire des exigences du contrôle des structures est applicable à l’association au bail.

Dans le cadre d’une cession, la sanction de la nullité du bail appliquée en cas de défaut d’autorisation d’exploiter pour le cessionnaire (C. rur., art. L. 331-6). L’action en nullité doit être précédée d’une mise en demeure du cessionnaire (C. rur., art. L. 331-7). La nullité du bail est prononcée en cas de refus définitif d’autorisation d’exploiter ou d’absence de présentation d’une demande d’autorisation dans le délai imparti par le préfet (Cass. 3e civ., 7 mars 2001, n° 99-16.396 : JurisData n° 2001-008635).

La solution retenue par le présent arrêt, qui fait du respect des exigences du contrôle des structures l’une des conditions de validité de l’association au bail, apparait justifiée. L’analogie entre l’association au bail et la cession se trouve renforcée. Cependant, il n’est pas exclu d’évoquer certaines interrogations que suscitent encore l’assimilation de l’association au bail à la cession sur le terrain du contrôle des structures.

   B –Bienfondé de l’assimilation de l’association au bail à la cession sur le terrain du contrôle des structures

Ecran de la société d’exploitation bénéficiaire d’une mise à disposition des terres louées. Suivant une jurisprudence constante, lorsque le cessionnaire du bail est également membre d’un GAEC bénéficiaire de la mise à disposition des biens loués, et que ce GAEC est déjà titulaire de l’autorisation d’exploiter, cette autorisation dispense le cessionnaire de solliciter lui-même une nouvelle autorisation (Cass. 3e civ., 4 mars 2009, n° 08-13.697, n° 282 FS-P+B+I, Delfolie c/ Verdonck et a. : Bull. civ. 2009, III, n° 54 ; JCP N 2011, 1124, obs. F. Roussel ; D. 2009, p. 812 obs. G. Forest ; Dict. perm. Entreprise agricole, bull. 418, repère p. 9275 ; Rev. Loyers 2009, p. 289, analyse B. Peignot ; AJDI 2009, p. 724, obs. S. Prigent).  

Par un arrêt du 14 novembre 2019 rendu dans l’hypothèse d’une association au bail, la Cour de cassation affirme que « lorsque les biens loués sont destinés à être exploités, dès l’association au bail, par la mise à disposition d’une société, l’activité de ce groupement doit être conforme à la réglementation sur le contrôle des structures » (Cass. 3e civ., 14 nov. 2019, n° 18-21.276 ; V. aussi Cass. 3e civ., 6 janv. 2010, n° 08-20.928). La jurisprudence consacre en matière de contrôle des structures un effacement de la personne du cessionnaire et par analogie du candidat à l’association derrière celle du groupement. Ainsi seul le groupement doit éventuellement disposer d’une autorisation d’exploitation si les conditions de mise en valeur des terres l’y obligent (C. rur., art. L. 331-1).

En l’espèce, même si l’arrêt commenté ne constate pas explicitement le mode d’exploitation en société, il n’est pas contesté que les terres louées étaient exploitées dans le cadre d’un GAEC. Par conséquent serait justifiée, dans le présent arrêt, la dispense du candidat à l’association de requérir une autorisation personnelle d’exploiter, sauf motif personnel l’y assujettissant comme un défaut de diplôme ou d’expérience (Cass. 3e civ., 5 nov. 2014, n°13-10.888).

Depuis la loi du 13 octobre 2014 et le décret du 22 juin 2015, l’article R. 331-1 du Code rural et de la pêche maritime énonce que : « pour l’application des dispositions du 1° de l’article L. 331-1 une personne associée d’une société à objet agricole est regardée comme mettant en valeur les unités de production de cette société si elle participe aux travaux de façon effective et permanente, selon les usages de la région et en fonction de l’importance de ces unités de production ». Dès lors, le cessionnaire potentiel devrait solliciter une autorisation s’il ne remplit pas personnellement les conditions, comme celle relative à la capacité professionnelle, quand bien même la société exploitante bénéficie déjà de l’autorisation (en ce sens, Cass. 3e civ., 12 avr. 2018, n° 17-16.965).

Appliquée à l’association au bail, il est envisageable de soutenir que le bénéficiaire de l’opération, en cas d’installation, agrandissement ou réunion d’exploitations, doit répondre aux exigences du contrôle des structures, nonobstant l’autorisation d’exploiter dont dispose le groupement.

📄 J.-V. Kouassi, Assimilation de l’association d’un proche au bail à une cession.pdf

Par Jean-Vianney Kouassi, Docteur en droit privé, membre de la Chaire de droit rural et de droit de l’environnement de l’Université de Bourgogne

source :  Le Quinzomadaire n°16/2024 est en ligne – Assimilation de l’association d’un membre de sa famille au bail rural à une cession

Date : 21 août 2024

MODIFICATIONS DU REGISTRE DE COMMERCE ET ANNULATION DE DELIBERATIONS DES ASSOCIES

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Angers, 13 juillet 2021), rendu sur renvoi après cassation (Com., 9 septembre 2020, n° 19-15.422), par un acte du 14 décembre 2004, la société UGMA, filiale de la société Groupe française de gastronomie (la société FDG), qui était son associée unique, a conclu avec la société Larzul un traité d’apport à cette dernière de son fonds de commerce. Par des délibérations du 30 décembre 2004, la société Vectora, associée unique de la société Larzul, a approuvé cette opération d’apport et l’augmentation de capital subséquente.

2. Par un acte du 20 septembre 2005, la société FDG a décidé la dissolution de la société UGMA.

3. Un arrêt irrévocable du 24 janvier 2012 a annulé les délibérations de la société Vectora du 30 décembre 2004 et constaté la caducité du traité d’apport du 14 décembre 2004.

4. Le 3 avril 2012, la société Larzul a obtenu du greffier d’un tribunal de commerce que des modifications soient apportées à son inscription au registre du commerce et des sociétés en y mentionnant l’arrêt du 24 janvier 2012 et en précisant un ensemble de modifications « suite à cette décision ».

5. La société FDG a, par voie de requête, demandé au juge commis à la surveillance de ce registre d’enjoindre au greffier de procéder à l’annulation de ces modifications et de rétablir l’état antérieur de ces inscriptions.

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

6. Les sociétés Larzul et Vectora font grief à l’arrêt d’enjoindre au greffe du tribunal de commerce de procéder à l’annulation des modifications inscrites à l’extrait Kbis de la société Larzul le 3 avril 2012 et de remettre les inscriptions en l’état antérieur à ces modifications, et d’enjoindre à la société Larzul de mettre ses statuts en conformité avec sa situation juridique, telle qu’elle résulte de l’arrêt de la cour d’appel d’Angers du 24 janvier 2012, alors « que ni le greffier ni le juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés n’ont le pouvoir de porter une appréciation sur la validité ou l’efficacité des actes et pièces déposés en vue de l’inscription d’une mention au registre du commerce et des sociétés ; qu’il résulte des constatations de l’arrêt que les inscriptions portées au registre du commerce et des sociétés le 3 avril 2012 relatives à la forme sociale de la société Larzul et à la réduction de son capital étaient justifiées par une délibération du 24 mars 2012, par laquelle la société Vectora, en qualité d’associé unique de la société Larzul, avait décidé, en conséquence de l’arrêt de la cour d’appel d’Angers du 24 janvier 2012, de constater que la société Larzul était une société par actions simplifiée unipersonnelle au capital de 3 300 000 euros, et de modifier ses statuts pour adopter à nouveaux ceux en vigueur antérieurement ; que, pour ordonner l’annulation de ces inscriptions, à la demande de la société FDG, qui prétendait qu’elle n’avait pas perdu la qualité d’associé et qu’ainsi la société Larzul ne disposait pas d’un associé unique, la cour d’appel retient, par motifs propres et adoptés, que l’arrêt du 24 janvier 2012 ne statue pas sur les conséquences des annulations prononcées et qu’un retour à la situation antérieure ne résulte pas expressément de cet arrêt ; qu’en se prononçant ainsi, la cour d’appel, qui a remis en cause le statut de société à associé unique de la société Larzul et la perte de la qualité d’associé de la société FDG, et ainsi la validité de la délibération prise le 24 janvier [lire : mars] 2012, par l’interprétation qu’elle a faite de l’arrêt du 24 janvier 2012, a tranché un débat de fond ne relevant pas de sa compétence et violé l’article L. 123-3 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

7. Il résulte de l’article R. 123-95 du code de commerce que le greffier vérifie que les énonciations d’une demande d’inscription au registre du commerce et des sociétés sont conformes aux dispositions législatives et réglementaires, correspondent aux pièces justificatives et actes déposés en annexe et sont compatibles, dans le cas d’une demande de modification ou de radiation, avec l’état du dossier, mais qu’il ne dispose d’aucun pouvoir d’interpréter lesdits actes et pièces justificatives.

8. Il résulte de l’article L. 123-6 du code de commerce que le juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés, compétent pour connaître de toutes contestations entre l’assujetti et le greffier, ne peut, à l’occasion d’une telle contestation, trancher un différend opposant la société assujettie à un tiers, telle la reconnaissance à ce dernier de sa qualité d’associé, qui ressortit au juge compétent sur le fond.

9. Ayant constaté que l’arrêt du 24 janvier 2012 s’était borné à annuler l’apport de fonds de commerce et l’augmentation de capital en résultant, mais qu’il n’en résultait ni l’anéantissement du protocole d’accord du 14 décembre 2004 et de tous les actes qui en sont la suite ni, par voie de conséquence, le retour à la situation antérieure à ce protocole, ce dont il se déduit que les énonciations de la demande de modification de l’inscription de la société Larzul au registre du commerce et des sociétés formée en 2012 n’étaient pas compatibles avec l’état du dossier, la cour d’appel, qui n’a pas tranché le débat de fond concernant la persistance de la qualité d’actionnaire de la société FDG et qui ne pouvait le faire sauf à méconnaître les limites de sa compétence juridictionnelle, a, à bon droit, confirmé l’ordonnance enjoignant au greffier de procéder à l’annulation des inscriptions modificatives litigieuses, portées le 3 avril 2012 au vu de cet arrêt.

10. Le moyen n’est donc pas fondé.

Mais sur le second moyen

Enoncé du moyen

  1. Les sociétés Larzul et Vectora font grief à l’arrêt d’enjoindre à la société Larzul de mettre ses statuts en conformité avec sa situation juridique, telle qu’elle résulte de l’arrêt du 24 janvier 2012, alors « que si l’article L. 123-3, alinéa 2, du code de commerce permet au juge commis à la surveillance du registre d’enjoindre à toute personne immatriculée de faire procéder aux mentions complémentaires ou rectifications qu’elle n’aurait pas fait porter dans les délais ou qui s’avéreraient nécessaires en cas de déclaration inexacte ou incomplète, ni ce texte ni aucune autre disposition légale ne l’autorise à enjoindre à une société immatriculée de modifier ses statuts ou d’en adopter de nouveaux ; qu’en enjoignant à la société Larzul de modifier ses statuts, la cour d’appel a excédé ses pouvoirs et violé l’article L. 123-3, alinéa 2, du code de commerce. »

Réponse de la Cour

Vu l’article L. 123-3, alinéa 2, du code de commerce :

  1. Selon ce texte, le juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés peut enjoindre à toute personne immatriculée à ce registre qui ne les aurait pas requises dans les délais prescrits, de faire procéder soit aux mentions complémentaires ou rectifications qu’elle doit y faire porter, soit aux mentions ou rectifications nécessaires en cas de déclarations inexactes ou incomplètes, soit à la radiation.
  2. L’arrêt confirme la décision du juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés ayant fait injonction à la société Larzul de mettre ses statuts en conformité avec sa situation juridique.
  3. En statuant ainsi, alors que le pouvoir d’injonction conféré au juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés ne peut porter que sur les mentions inscrites sur ce registre et non sur les énonciations des actes et pièces justificatives au vu desquelles le greffier procède aux inscriptions requises, la cour d’appel, qui a excédé ses pouvoirs, a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

  1. Ainsi qu’il est suggéré en demande, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l’organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.
  2. L’intérêt d’une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.
  3. Le juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés ne disposant pas du pouvoir d’enjoindre à une société immatriculée de modifier ses statuts ou d’en adopter de nouveaux, la demande tendant à ce que les statuts de la société Larzul soient mis en conformité avec sa situation juridique, telle qu’elle résulte de l’arrêt du 24 janvier 2012, ne peut qu’être déclarée irrecevable.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, confirmant l’ordonnance du juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés, il enjoint à la société Larzul de mettre ses statuts en conformité avec sa situation juridique, telle qu’elle résulte de l’arrêt de la cour d’appel d’Angers du 24 janvier 2014, et en ce qu’il statue sur l’article 700 du code de procédure civile et sur les dépens, l’arrêt rendu le 13 juillet 2021, entre les parties, par la cour d’appel d’Angers ;

DIT n’y avoir lieu à renvoi ;

DECLARE irrecevable la demande de la société Groupe française de gastronomie tendant à ce que la société Larzul soit enjointe de mettre ses
statuts en conformité avec sa situation juridique, telle qu’elle résulte de l’arrêt de la cour d’appel d’Angers du 24 janvier 2014 ;

Dit que chaque partie conservera la charge de ses propres dépens, en ce compris ceux exposés devant la cour d’appel d’Angers ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du premier juin deux mille vingt-trois.

1 juin 2023 Cour de cassation Pourvoi n° 21-22.446 Chambre commerciale financière et économique – Formation restreinte hors RNSM/NA Publié au Bulletin ECLI:FR:CCASS:2023:CO00407

BAIL RURAL ET CONTINUATION AU PROFIT DU CONJOINT même si la qualité de conjoint est peu avant le décès du fermier en titre

En application de l’article L. 411-34, alinéa 1er, du code rural et de la pêche maritime, en cas de décès du preneur, le bail continue au profit de son conjoint participant à l’exploitation ou y ayant participé effectivement au cours des cinq années antérieures au décès, peu important qu’il n’ait acquis la qualité de conjoint que peu de temps avant son décès.

Cour de cassation, 3e chambre civile, 16 Novembre 2022 – n° 21-18.527

Rappel des dispositions de l’article L 411-34 du code rural

Article L411-34

en vigueur depuis le 15 octobre 2014

Modifié par LOI n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 – art. 5

En cas de décès du preneur, le bail continue au profit de son conjoint, du partenaire avec lequel il est lié par un pacte civil de solidarité, de ses ascendants et de ses descendants participant à l’exploitation ou y ayant participé effectivement au cours des cinq années antérieures au décès. Le droit au bail peut, toutefois, être attribué par le tribunal paritaire au conjoint, au partenaire d’un pacte civil de solidarité ou à l’un des ayants droit réunissant les conditions précitées. En cas de demandes multiples, le tribunal se prononce en considération des intérêts en présence et de l’aptitude des différents demandeurs à gérer l’exploitation et à s’y maintenir.

Les ayants droit du preneur ont également la faculté de demander la résiliation du bail dans les six mois à compter du décès de leur auteur.

Le bailleur peut demander la résiliation du bail dans les six mois à compter du jour où le décès est porté à sa connaissance lorsque le preneur décédé ne laisse pas de conjoint, de partenaire d’un pacte civil de solidarité ou d’ayant droit réunissant les conditions énoncées au premier alinéa.

Si la fin de l’année culturale est postérieure au décès de neuf mois au moins, la résiliation peut, au choix des ayants droit, prendre effet soit à la fin de l’année culturale en cours, soit à la fin de l’année culturale suivante. Dans le cas contraire, la résiliation ne prendra effet qu’à la fin de l’année culturale suivante.

RAPPEL DU PRINCIPE D’INCESSIBILITE du bail rural

….L’article L.411-35 du code rural et de la pêche maritime dispose que sous réserve des dispositions particulières aux baux cessibles hors cadre familial et nonobstant les dispositions de l’article 1717 du code civil, toute cession de bail est interdite, sauf si la cession est consentie avec l’agrément du bailleur, au profit du conjoint ou du partenaire d’un pacte civil de solidarité du preneur participant à l’exploitation ou aux descendants du preneur ayant l’âge de la majorité ou ayant été émancipé. A défaut d’agrément du bailleur, la cession peut être autorisée par le tribunal paritaire.

La faculté de cession exceptionnelle doit être réservée au preneur de bonne foi qui s’est constamment acquitté de ses obligations…..

Cour d’appel, Metz, 3e chambre, 26 Juillet 2022 – n° 19/01854 Décision Infirmation Répertoire Général : 19/01854

Loi du 23 décembre 2021 portant mesures d’urgence pour assurer la régulation de l’accès au foncier agricole au travers de structures sociétaires

Une loi pour favoriser l’installation des agriculteurs et le renouvellement des générations agricoles.

Elle instaure une nouvelle procédure de contrôle des cessions de parts et actions de sociétés sur le marché du foncier agricole.

https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000044553572

Le cessionnaire d’un bail doit, se consacrer immédiatement à l’exploitation du bien et participer aux travaux sur les lieux de façon effective et permanente.

Il résulte de l’article L. 411-35 du code rural et de la pêche maritime que le cessionnaire du bail doit, comme tout repreneur, se consacrer immédiatement à l’exploitation du bien et participer aux travaux sur les lieux de façon effective et permanente.

Selon l’article 500 du code de procédure civile, a force de chose jugée le jugement qui n’est susceptible d’aucun recours suspensif d’exécution.

Viole ces textes, en statuant par des motifs impropres à justifier l’abstention d’exploiter du preneur postérieure à la date de l’arrêt autorisant la cession à son profit, la cour d’appel qui, pour rejeter une demande de résiliation, retient que le bailleur ne peut pas utilement reprocher au cessionnaire de ne pas s’être personnellement consacré à l’exploitation des parcelles louées dès la date de cet arrêt, dès lors qu’un pourvoi a été formé et que, même si celui-ci n’a aucun effet suspensif, la cession définitive n’est intervenue que lorsque la Cour de cassation a validé cette cession.

Arrêt n°925 du 3 décembre 2020 (19-23.990) – Cour de cassation – Troisième chambre civile
-ECLI:FR:CCAS:2020:C300925


 

VENTE D’UNE PROPRIETE ET CLASSEMENT AU CADASTRE EN NATURE DE BOIS

Selon l’article L. 331-19 du Code forestier, en cas de vente d’une propriété classée au cadastre en nature de bois d’une superficie totale inférieure à 4 hectares, les propriétaires d’une parcelle boisée contiguë, tels qu’ils sont désignés sur les documents cadastraux, à la propriété vendue bénéficient d’un droit de préférence

Selon l’article L. 331-22 du Code forestier, la commune bénéficie d’un droit de préemption en cas de vente d’une propriété classée au cadastre en nature de bois d’une superficie totale inférieure à 4 hectares ou sans limitation de superficie lorsque le vendeur est une personne publique dont les bois et forêts relèvent du régime forestier.

Selon l’article L. 331-23 du Code forestier, l’État bénéficie d’un droit de préemption si une forêt domaniale jouxte la propriété vendue qui est classée au cadastre en nature de bois et forêts et d’une superficie inférieure à 4 hectares .

Selon l’article L. 331-24 du Code forestier, la commune bénéficie d’un droit de préférence en cas de vente d’une propriété classée au cadastre en nature de bois d’une superficie totale inférieure à 4 hectares.

Toute cession de bail rural est interdite

La Cour de Cassation vient de rappeler,

Vu l’article L. 411-35 du code rural et de la pêche maritime ;

Attendu qu’il résulte de ce texte que la faculté de céder le bail dans le cercle familial est réservée au preneur de bonne foi ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Douai,13 septembre 2018), que, par acte du 24 septembre 1997, Paul D. et son épouse, décédée depuis, ont consenti à M. H. un bail à ferme sur plusieurs parcelles ; que, par acte du 20 mars 2014, M. D., agissant en qualité de nu-propriétaire et de curateur de Paul D., a donné congé à M. H. pour cause d’âge de la retraite et, subsidiairement, pour reprise par le petit-fils du bailleur ; qu’il est devenu plein propriétaire des terres au décès de Paul D. survenu le 1 novembre 2014 ; que M. H. a saisi le tribunal paritaire des baux ruraux en annulation du congé et autorisation de céder le bail à sa fille ;

Attendu que, pour accueillir ses demandes, l’arrêt retient que le preneur a mis les terres à la disposition d’une Earl sans en informer le bailleur en temps utile et a procédé à un échange en jouissance des parcelles louées sans solliciter l’agrément de leur propriétaire, mais que ces manquements ne sont pas suffisamment graves pour justifier un refus d’autorisation de cession du bail ;

Qu’en statuant ainsi, alors que l’autorisation de céder ne peut être accordée qu’au preneur qui s’est acquitté de toutes les obligations légales ou conventionnelles résultant de son bail, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 13 septembre 2018, entre les parties,

Cour de cassation, 3e chambre civile, 6 Février 2020 – n° 18-24.425

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