EXPOSE DU LITIGE :
La CUMA des Chambarands Drômois (la CUMA) immatriculée au greffe du tribunal de commerce de Romans-sur-Isère le 22 avril 1982 a pour activité principale l’acquisition de matériel principalement d’ensilage et de travaux agricoles, utilisé ensuite par les membres associés coopérateurs.
Le GAEC de [Adresse 4] composé de deux associés, [S] [T] et [C] [U], spécialisé dans l’activité d’élevage et céréalière pour alimenter le cheptel, a adhéré à la CUMA Des Chambarands Drômois en 1988.
Le 18 février 2014, préalablement à l’acquisition d’une nouvelle ensileuse, les associés coopérateurs de la CUMA intéressés ont signé un engagement visant ainsi qu’il suit à :« utiliser ce matériel sur leur exploitation pendant une durée minimale de 10 années (durée d’amortissement) et pour un volume de travaux correspondant aux unités de travail souscrites ci-après sauf cas de force majeure reconnu valable par le conseil d’administration».
Le Gaec de [Adresse 4] a signé ce bulletin d’adhésion et d’engagement pour une surface de 60 hectares.
Par courrier du 15 juillet 2022, la CUMA a notifié au Gaec de [Adresse 4] son exclusion votée par le conseil d’administration le 7 juin 2022 pour ne pas avoir fait travailler en priorité la CUMA et pour non-respect de ses engagements moraux vis-à-vis de cette dernière.
Le Gaec de [Adresse 4] a contesté les motifs de son exclusion, ainsi que les conditions de forme dans laquelle elle est intervenue. Il a adressé deux mises en demeure à la CUMA des Chambarands Drômois, demeurées sans réponse.
Par acte de commissaire de justice du 26 octobre 2023, le GAEC de [Adresse 3] a fait délivrer assignation à la CUMA des Chambarands Drômois devant le tribunal judiciaire de Valence aux fins de voir :
– déclarer sa demande recevable et bien fondée, et en conséquence :
– condamner le requis à lui payer la somme de :
*36.897,08 euros en principal, assortie des intérêts au taux légal à compter du jour de la mise en demeure du 9 mars 2022,
*3.000 euros à titre de dommages et intérêts pour violation des dispositions statutaires,
*3.000 euros au titre du préjudice moral,
*3.165,88 euros au titre du reliquat du remboursement des parts sociales,
– ordonner l’exécution provisoire,
– condamner le requis à payer la somme de 3.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
– débouter la CUMA des Chambarands de l’intégralité de ses prétentions,
– condamner les requis aux entiers dépens et dire que, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile, Maître Vincent Bard pourra recouvrer directement les frais dont il a fait l’avance sans en avoir reçu provision.
Par jugement du 22 février 2024, le tribunal judiciaire de Valence a :
– débouté le GAEC de [Adresse 4] de l’intégralité de ses demandes,
– condamné le GAEC de [Adresse 4] aux entiers dépens de l’instance.
Par déclaration du 4 mars 2024, le GAEC de [Adresse 4] a interjeté appel de ce jugement.
Prétentions et moyens du GAEC de [Adresse 4] :
Aux termes de ses dernières écritures récapitulatives n°2 notifiées par voie dématérialisée le 20 décembre 2024, le GAEC de [Adresse 4], demande à la cour de :
– déclarer son appel recevable et bien fondée, et en conséquence :
– réformer dans toutes ses dispositions la décision querellée,
-condamner le requis à lui payer la somme de :
*36.897,08 euros en principal, assortie des intérêts au taux légal à compter du jour de la mise en demeure du 9 mars 2022,
*3.000 euros à titre de dommages et intérêts pour violation des dispositions statutaires,
*3.000 euros au titre du préjudice moral,
*3.165,88 euros au titre du reliquat du remboursement des parts sociales,
– condamner le requis à payer la somme de 3.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
– débouter la CUMA des Chambarands de l’intégralité de ses prétentions,
– condamner les requis aux entiers dépens et dire que, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile, Maître Vincent Bard pourra recouvrer directement les frais dont il a fait l’avance sans en avoir reçu provision.
Au soutien de ses prétentions, il fait valoir que la décision d’exclusion est fautive ce qui lui cause un préjudice et justifie sa demande d’indemnisation dès lors que :
– en application des statuts, l’exclusion ne peut être prononcée qu’à la double majorité des 2/3 des membres du conseil d’administration présents et statuant à la majorité des 2/3 en faveur de l’exclusion,
– le tribunal judiciaire de Valence a donc commis une erreur de droit en mettant à sa charge la preuve du respect de cette formalité alors qu’il lui appartenait de vérifier si les conditions avaient été remplies, dès lors que l’intimée n’a pas comparu en première instance,
– il appartient à l’intimée de justifier du respect de cette double majorité,
Elle fait également valoir que la décision d’exclusion est infondée dès lors que :
– elle a réclamé à plusieurs reprises le règlement intérieur dont se prévaut l’intimée sans que copie ne lui en soit transmis,
– le document produit n’est ni daté ni signé, de sorte que l’intimée ne peut se prévaloir de ce document qui lui est totalement inopposable,
– il résulte de la délibération du 7 juin 2022 ayant prononcé l’exclusion du GAEC, qu’aucune démarche contradictoire n’a été initiée à son égard et que contrairement à ce qui est mentionné, aucune démarche amiable n’a été initiée par le président pour un accord amiable, aucune pièce ne vient d’ailleurs corroborer cette affirmation,
– au contraire il ressort des pièce 6a et 6c que M. [T], pourtant administrateur de la CUMA et associé du GAEC de [Adresse 3], n’a pas été convoqué ce qui vicie d’autant la procédure,
– aucun document comptable n’est produit par l’intimée à l’appui de ses affirmations sur les risques d’une prétendue faillite financière, laquelle se contente de produire en cause d’appel un succinct bilan 2022 de deux pages et un relevé de compte au 31 mars 2023 qui n’apporte strictement rien aux débats si ce n’est la situation sur un compte bancaire au 31 mars 2023 soit plus de neuf mois après son exclusion,
– en revanche, le bilan au 31 décembre 2022 démontre que la CUMA a, à cette date, effectivement des capitaux propres de plus de 412.000 et des liquidités supérieures à 97.000 euros le tout permettant de largement faire face au solde des prêts bancaires pour environ 81.000 euros sans qu’il ne soit par ailleurs possible de les rattacher aux ensileuses et ces chiffres démontrent que la CUMA ne souffrait nullement de l’attitude du GAEC de [Adresse 4],
– surtout, les ensileuses ont été achetées en 2014 et à la date de la sanction prononcée à l’encontre du GAEC de [Adresse 4] ces machines agricoles étaient payées et amorties sans que l’attitude du GAEC de [Adresse 4] n’ait mis en cause la pérennité de la CUMA et ce d’autant que ses engagements hors CUMA ont débuté la même année que l’achat des ensileuses,
– l’article 8 des statuts précise que les coopérateurs devront recourir aux prestations et matériels de la CUMA dans « la mesure de ses besoins », de sorte qu’il n’est pas stipulé un recours exclusif aux prestations/matériels de la CUMA et à ce titre, le matériel proposé ne correspondait pas aux besoins du GAEC de [Adresse 4] qui devait faire face à une surface de 60 hectares à ensiler sur des terres principalement pentues, comme en attestent ses deux dirigeants, M. [T] et M. [U],
– d’autres coopérateurs avaient également recours à des prestataires extérieurs sans susciter les moindres sanctions, comme cela résulte des nombreuses attestations versées aux débats,
– les alinéas 6 et 7 de l’article 8 des statuts prévoient que des pénalités pouvant être mises à la charge des coopérateurs qui ne respecteraient pas leurs engagements avec notamment la prise en charge de frais fixes, ainsi qu’une pénalité de 30%, de sorte que préalablement à toute exclusion ces dispositions prévoyaient des sanctions éventuelles, l’exclusion demeurant l’exception sans doute pour les récidivistes,
– les attestations de messieurs [V] confirment que l’exclusion du GAEC de [Adresse 3] a surpris nombre d’adhérents et ce d’autant que tout le monde savait que compte tenu des particularismes liées à sa production de ray gras, le GAEC utilisait une entreprise extérieure, la CUMA ne pouvant fournir de matériel adéquat.
Pour justifier de son préjudice financier, il indique que :
– compte tenu de son exclusion, il n’a pu bénéficier des prestations dont il pouvait bénéficier en qualité d’associé de la CUMA notamment en période de moissons, soit, pour la saison 2021, le bénéfice de tarifs lui permettant de louer des remorques permettant le transport du maïs et du sorgho, ainsi que la location de l’ensileuse et le roulage des produits, le tout pour un montant global de 5.085,25 euros HT soit 6.102.3 euros TTC,
– il a dû avoir recours à deux prestataires, la société Domagri pour le transport d’orge et de maïs et la société [E] [K] pour les travaux d’ensilage, l’ensemble de ces prestations ont été réalisées en 2022 pour un montant total de 20.344,65 euros TTC, soit 17.384,28 euros HT, soit un surcoût par rapport à l’exercice précédent de 12.299,03 euros,
– l’engagement se termine au terme de l’exercice 2024, de sorte qu’il est donc fondé à solliciter une indemnité de 36.897,08 euros, somme à parfaire en cours de procédure.
Pour justifier de son préjudice pour violation des dispositions statutaires, il expose que le non-respect de ces dispositions lui cause un préjudice distinct du préjudice financier d’un montant de 3.000 euros.
Il indique que son préjudice moral est évalué également à 3.000 euros.
Au soutien de sa demande en remboursement des parts sociales, il fait valoir que le seul fait d’encaisser le chèque ne vaut nullement reconnaissance du bien-fondé de la sanction, alors qu’il a toujours précisé qu’il imputait ce versement sur son préjudice futur et qu’il s’est engagé sur 60 hectares à 69 euros la part, soit un montant total de 4.140 euros, de sorte que le remboursement opéré ne couvre nullement cet engagement puisqu’il a été remboursé au GAEC de [Adresse 4] la somme de 974,12 euros soit un manquant de 3.165,88 euros.
Pour s’opposer aux demandes indemnitaires de l’intimée, il expose que la CUMA des Chambarands n’a subi aucun préjudice et que les demandes ne sont pas étayées.
Prétentions et moyens de la CUMA des Chambarands Drômois:
Aux termes de ses dernières écritures notifiées par voie dématérialisée le 8 avril 2025, la CUMA des Chambarands Drômois demande à la cour au visa des articles R.522-3 du code rural et de la pêche maritime et 1231-1 du code civil de :
– confirmer en toutes ces dispositions le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Valence le 22 février 2024,
Statuant à nouveau,
– condamner le GAEC de [Adresse 4] à lui verser la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner le GAEC de [Adresse 4] aux entiers dépens.
Au soutien de sa demande de confirmation du jugement, elle fait valoir que l’appelant n’a pas respecté les engagements fixés à l’article 8 des statuts de la CUMA et à l’article 4 du règlement intérieur, ce qui justifie son exclusion, dès lors que :
– l’article 8 de ses statuts intitulé « Obligations des associés » rappelle les obligations des associés notamment des associés coopérateurs indiquées à l’article R.522-3 du code rural, à savoir que ‘l’adhésion à la coopérative entraîne pour l’associé coopérateur l’engagement d’utiliser, en ce qui concerne son exploitation et dans toute la mesure de ses besoins, un ou plusieurs services que la coopérative est en mesure de lui procurer, l’engagement d’utiliser, en ce qui concerne son exploitation et dans la mesure de ses besoins, l’activité de groupement d’employeurs que la coopérative est en mesure de lui procurer et l’obligation, en application des dispositions du paragraphe 4 de l’article 14 ci-dessous, de souscrire ou d’acquérir par voie de cession, et dans ce dernier cas avec l’accord de la coopérative, le nombre de parts sociales correspondant aux engagements pris’,
– l’article 12 point 1 de ses statuts intitulé « Exclusion » fixe la procédure et les modalités de contestation prévue par l’associé coopérateur exclu en ces termes: «l’exclusion d’un associé coopérateur peut être prononcée par le conseil d’administration pour des raisons graves, notamment si l’associé coopérateur a été condamné à une peine criminelle, s’il a nui ou tenté de nuire sérieusement à la coopérative par des actes injustifiés, s’il a contrevenu sans l’excuse justifiée de la force majeure aux engagements contractés aux termes de l’article 8. La décision du conseil d’administration est immédiatement exécutoire »,
– or, l’appelant reconnaît avoir fait intervenir des prestataires autres que la CUMA pour faire réaliser des prestations d’ensilage alors qu’elle fournit cette prestation et les termes utilisés à l’article 8 des statuts « dans la mesure de ses besoins » ne l’autorise pas à se libérer de ses engagements quand il le souhaite, alors que ces termes doivent permettre aux associés coopérateurs, quelle que soit la taille de leur exploitation, de pouvoir profiter des services de la CUMA et n’autorisent pas un associé coopérateur, qui s’est engagé préalablement à l’acquisition des matériels d’ensilage par la CUMA à rompre son engagement à son égard en utilisant les services de prestataires concurrents,
– l’engagement dans la CUMA est dû et contraignant, une fois l’engagement pris, il doit être respecté pendant toute la durée de vie du matériel quand bien même les services ne correspondraient pas exactement à l’évolution des besoins du GAEC de [Adresse 4], ce dernier restant engagé à hauteur des heures indiquées sur le bulletin d’engagement,
– si ses services ne correspondaient plus à ses besoins, le GAEC de [Adresse 4] aurait pu solliciter une diminution de son engagement ou le retrait de la CUMA, ou l’acquisition par celle-ci de nouveaux matériels, démarches qu’il n’a jamais engagées,
– si le GAEC de [Adresse 4] avait considéré en 2014 que le matériel n’était pas adapté à ses besoins, il avait une totale liberté pour ne pas adhérer au service ensilage pendant dix ans, temps nécessaire pour l’amortissement des ensileuses, et à ce titre, le bulletin d’adhésion daté du 18 février 2014 montre que certains associés coopérateurs n’ont pas souhaité adhérer à ce service, le GAEC de [Adresse 4] a fait un autre choix en s’engageant à utiliser l’ensileuse acquise pendant dix ans,
– de plus, les autres membres de la CUMA sont aussi éleveurs et à ce titre soumis à des contraintes de qualité,
– l’appelant a préféré utiliser les services de prestataires faisant directement concurrence aux services qu’elle propose pour l’activité ensilage et en agissant ainsi, il a obligé ses autres membres à assumer la prise en charge de l’amortissement du matériel d’ensilage,
– l’appelant ne produit aucun élément caractérisant la force majeure et permettant de justifier le défaut d’utilisation du matériel,
– l’appelant ne fournit aucune demande de dérogation faite au conseil d’administration le dispensant d’utiliser les services ensilage de la CUMA et a fortiori, il ne fournit aucune réponse que lui aurait faite son conseil d’administration visant à l’autoriser à ne pas utiliser son service d’ensilage.
Elle fait également valoir que le GAEC de [Adresse 4] n’a pas respecté la procédure de contestation de son exclusion, dès lors que :
– l’article 12 point 3 des statuts de la CUMA des Chambarands Drômois intitulé « Exclusion » fixe les modalités de contestation de l’exclusion par l’associé coopérateur exclu en ces termes : « la décision d’exclusion peut faire l’objet d’un recours devant l’assemblée générale. Ce recours doit être exercé à peine de forclusion par l’associé coopérateur dans les deux ans suivant la date de notification par le conseil d’administration de la décision d’exclusion. Il doit être notifié au président du conseil d’administration qui en saisira la première assemblée générale convoquée postérieurement à la réception par lui de la notification. Ce recours n’est pas suspensif »,
– l’appelant reconnaît dans ses écritures avoir reçu le 15 juillet 2022 une lettre lui notifiant son exclusion votée par le conseil d’administration le 7 juin 2022, et la possibilité d’être entendu par l’assemblée générale de la CUMA pour contester la décision d’exclusion lui a été rappelée par la Fédération Départementale des CUMA de la Drôme par courrier du 3 juillet 2023, de sorte qu’il disposait alors encore d’un délai d’un an pour contester la décision d’exclusion, ce qu’il n’a pas fait durant le délai de deux ans suivant son exclusion,
– à défaut d’utilisation de la possibilité de recours devant l’assemblée générale, son exclusion est devenue définitive.
Pour s’opposer aux demandes indemnitaires du GAEC de [Adresse 4], elle soutient que ce dernier ne justifie pas d’un quelconque préjudice.
S’agissant de la demande de remboursement des parts sociales, elle expose que
ne peuvent être remboursées que les parts qui ont été souscrites au départ, et que, le GAEC de [Adresse 4] ayant souscrit des parts pour un montant de 974.12 euros, il ne peut prétendre exiger le remboursement d’un montant de capital social qu’il n’a pas souscrit. Il n’y a pas lieu de rembourser 3165.88 euros. La sincérité d’une telle demande peut être mise en doute venant d’un ancien administrateur de la CUMA.
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 22 mai 2025, l’affaire a été appelée à l’audience du 19 juin 2025 et la décision mise en délibéré a été prononcée le 2 octobre 2025.
Par conclusions notifiées le 2 juin 2025, la CUMA des Chambarands Drômois, demande à la cour au visa des articles 15, 16 et 135 et 802 du code de procédure civile de rejeter des débats les conclusions récapitulatives du GAEC de [Adresse 4] et la pièce n° 21 communiquée par le GAEC de [Adresse 4] au motif que ces conclusions récapitulatives et cette pièce ont été communiquées respectivement le 22 mai 2025 à 11h27 et à 11h28, soit après la clôture prononcée le même jour à 09h00.
MOTIFS DE LA DECISION :
Sur le rejet des conclusions du GAEC de [Adresse 4] notifiées par voie dématérialisée le 22 mai 2025
Les conclusions récapitulatives du GAEC de [Adresse 4] signifiées le 22 mai 2025 à 11h27 et la nouvelle pièce n°21 communiquée le même jour à 11h28, après la clôture prononcée le même jour à 09h00, sont en conséquence irrecevables.
Sur les demandes indemnitaires du GAEC de [Adresse 4]
En application de l’article 1103 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.
Conformément à l’article 1104 du même code, les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi. Cette disposition est d’ordre public.
En l’espèce, l’article 12 des statuts mis à jour le 30 mars 2019 stipule ainsi qu’il suit : ‘ l’exclusion d’un associé coopérateur peut être prononcée par le conseil d’administration pour des raisons graves, notamment si l’associé coopérateur a été condamné à une peine criminelle, s’il a nui ou tenté de nuire sérieusement à la coopérative par des actes injustifiés, s’il a contrevenu sans excuse justifiée de la force majeure aux engagements contracté aux termes de l’article 8. La décision du conseil d’administration est immédiatement exécutoire.
Le conseil d’administration ne peut délibérer valablement à cet égard qu’à la condition de réunir le quorum des deux tiers de ses membres et de se prononcer à la majorité des deux tiers des voix des administrateurs présents.
La décision d’exclusion peut faire l’objet d’un recours devant l’assemblée générale. Ce recours doit être exercé à peine de forclusion par l’associé coopérateurs dans les deux ans, suivant la date de la notification par le conseil d’administration de la décision d’exclusion. Il doit être notifié au président du conseil d’administration qui en saisira la première assemblée générale, convoquée postérieurement à la réception par lui de la notification. Ce recours n’est pas suspensif’.
Par ailleurs, l’article 8 des statuts stipule ainsi qu’il suit : ‘l’adhésion à la coopérative entraîne pour l’associé coopérateur :
1°l’engagement d’utiliser, en ce qui concerne son exploitation et dans toute la mesure de ses besoins, un ou plusieurs des services, que la coopérative est en mesure de lui procurer,
1° Bis l’engagement d’utiliser, en ce qui concerne son exploitation dans la mesure de ses besoins, l’activité de groupement d’employeur que la coopérative est en mesure de lui procurer,
2° l’obligation en application des dispositions du paragraphe quatre de l’article 14, ci-dessous de souscrire ou d’acquérir par voie de cession et dans ce dernier cas avec l’accord de la coopérative, le nombre de parts correspondant aux engagements pris.
L’engagement d’activité de la société coopérateurs est formalisé par la signature d’un bulletin d’engagement, reprenant la nature, la durée et les modalités de cet engagement’.
Il est constant que le GAEC de [Adresse 4] a régularisé le 18 février 2014, le bulletin d’adhésion et d’engagement de la CUMA par lequel il s’est engagé à régler le capital social correspondant à l’achat d’une ensileuse de marque CLAAS type Jaguar 840, neuf pour un nombre d’unité souscrite de 60 hectares et à utiliser ce matériel sur son exploitation pendant une durée minimale de 10 années (durée d’amortissement) et pour un volume de travaux correspondant aux unités de travail souscrites, sauf cas de force majeure reconnu valable par le conseil d’administration.
Selon délibération en date du 7 juin 2022, le conseil d’administration de la CUMA a constaté que le GAEC de [Adresse 4] a fait appel à une ETA pour un ensilage sans andaineur en avril 2022 alors que c’est exactement le service que fourni la CUMA et a en conséquence, prononcé son exclusion aux motifs ‘du non respect des engagements de l’adhérent et d’esprit coopératif, de problèmes relationnels avec les adhérents de la CUMA, de problèmes d’équité avec les autres adhérents et de mise en péril de l’activité de la CUMA sur le long terme’.
Contrairement à ce que soutient la CUMA, l’absence de recours contre la décision d’exclusion devant l’assemblée générale n’est pas de nature à rendre définitive la décision d’exclusion, alors que l’article 12.3 des statuts, qui stipule que la décision d’exclusion peut faire l’objet d’un recours devant l’assemblée générale, n’érige pas un tel recours en obligation et alors qu’une décision d’exclusion même définitive ne prive pas l’adhérent comme en l’espèce du droit d’en demander l’annulation devant les juridictions de l’ordre judiciaire.
S’agissant du grief tenant à l’absence de respect du quorum nécessaire pour prononcer l’exclusion d’un membre de la coopérative, la cour observe que c’est sans inverser la charge de la preuve que le premier juge a retenu qu’il appartient au GAEC de [Adresse 3], qui se prévaut de l’absence de respect de la règle de majorité fixée par les statuts pour prononcer l’exclusion d’un membre de la coopérative, de rapporter la preuve de la méconnaissance des dispositions de l’article 12 des statuts précité.
En conséquence, le GAEC de [Adresse 4] qui se contente d’affirmer qu’il appartient à l’intimée de justifier du respect de la règle de la double majorité, échoue à rapporter la preuve de l’irrégularité alléguée.
S’agissant du grief tenant à l’absence de fondement de la décision d’exclusion, la cour observe qu’il est constant que le GAEC de [Adresse 4] a eu recours à l’utilisation d’un autre matériel d’ensilage que celui de la CUMA des Chambarands Drômois pour l’exploitation de ses terres agricoles, ce qu’il reconnaît expressément.
Or, si M. [X] atteste qu’en sa qualité de chauffeur d’ensileuse auprès de l’ETA [E] [K], il effectue un travail d’ensilage au GAEC de [Adresse 3] et dans d’autres exploitations, il ne résulte aucunement de ce témoignage, que ces autres exploitations sont également membres de la CUMA et le seul témoignage de M. [E], affirmant que d’autres adhérents de la CUMA
font appel à ses services, qui est isolé, imprécis et dont l’impartialité est questionnée, s’agissant d’un client de l’appelant, est insuffisant à établir la réalité de cette affirmation.
Par ailleurs, s’il n’est pas contestable que l’article 8 des statuts précités, fait obligation aux adhérents d’utiliser un ou plusieurs des services que la coopérative est en mesure de leur procurer, la cour observe que le premier juge a exactement retenu que le GAEC de [Adresse 4] ne justifie pas que le matériel proposé par la CUMA ne correspond pas à ses besoins. En effet, d’une part, les témoignages en ce sens de M.[T] et de M.[U], constituent des preuves à soi-même dépourvues de force probante s’agissant de membres du GAEC de [Adresse 4]. D’autre part, les témoignages de [Y] et [G] [V], rédigés en des termes sinon identiques et tout cas très proches, et attestant de ce que le recours par l’appelant à un autre prestataire résulte de ce que la CUMA n’accepte pas, par peur de casse du matériel, le prefannage et l’andainage nécessaire au GAEC engagé dans le développement d’une activité d’ensilage de ray grass, qui sont isolés, et non circonstanciés, sont insuffisants à établir que le matériel fourni par la CUMA ne correspond pas aux besoins de l’exploitation du GAEC de [Adresse 4].
C’est encore vainement que l’appelant soutient qu’à la date de son exclusion, le 7 juin 2022, l’ensileuse achetée en 2014 était amortie, de sorte qu’aucune mise en cause de la pérennité de la coopérative ne résulterait du recours à un autre prestataire, alors qu’il ressort des termes mêmes du bulletin d’adhésion et d’engagement à la CUMA des Chambarands Drômois régularisé le 18 février 2014, que la durée minimale de 10 ans de son engagement à utiliser l’ensileuse litigieuse sur son exploitation correspond à la durée d’amortissement du matériel.
Le moyen tiré de ce que le règlement intérieur ne lui est pas opposable en ce qu’il n’est ni daté ni signé, est inopérant, alors que la décision d’exclusion se fonde expressément sur les statuts de la CUMA.
Il résulte de l’ensemble de ces éléments que le GAEC de [Adresse 4] qui en 2022 a eu recours à du matériel d’un autre prestataire de service, sans qu’il soit démontré que l’ensileuse acquise par la CUMA des Chambarands Drômois et qu’il s’est engagé à utiliser pendant 10 ans, n’était pas adapté aux besoins de son exploitation, a contrevenu sans excuse de la force majeure aux engagements contractés aux termes de l’article 8 des statuts de la coopérative, de sorte que la décision d’exclusion est parfaitement fondée et le jugement déféré est confirmé.
Sur la demande en paiment de la somme de 3.165,88 euros au titre d’un reliquat de remboursement des parts sociales
En l’espèce, par application de l’article 12. 4 des statuts de la CUMA, l’associé coopérateur exclu a droit au remboursement de ses parts de capital social dans les conditions prévues à l’article 20.
L’article 20 des statuts stipule ainsi que le remboursement des parts sociales s’effectue à leur valeur nominale sans préjudice des Intérêts, des dividendes et des ristournes qui peuvent revenir à l’intéressé mais sous déduction des sommes éventuellement dues au titre de l’article 8, paragraphes 6 et 7. En tout état de cause, le remboursement du capital social est réduit à due concurrence de la contribution de l’associé aux pertes inscrites au bilan au jour de la perte de la qualité d’associé, lorsque celles-ci sont supérieures aux réserves autres que la réserve légale, les réserves indisponibles et la réserve constituée pour compenser les parts annulées.
L’article 14 stipule que ‘le capital social initial s’élevait à la somme de 67.500 francs, Par suite des augmentations de capital réalisées depuis la constitution de la société, le capital social souscrit à la date du 31/12/2017 s’élève à 47.340 euros. Il est divisé en 30 941 parts d’un montant de 1,53 euros chacune.
Il est divisé en deux fractions correspondant l’une aux souscriptions des associés coopérateurs, l’autre aux souscriptions ou acquisitions des associés non coopérateurs. Le capital social souscrit ou acquis dans le cadre de l’engagement d’activité est réparti entre les associés coopérateurs en fonction des opérations qu’ils s’engagent à effectuer avec la coopérative selon les modalités et conditions suivantes : cf. règlement intérieur’.
Le règlement intérieur précise le détail des souscriptions par matériel de la manière suivante: 45 parts/ha ensilés – montant part sociale = 1,53 euros.
Enfin, il ressort du bulletin d’engagement et d’adhésion en date du 18 février 2014 signé par l’ensemble des adhérents dont le GAEC de Mongalix, que ce dernier a souscrit pour 60 hectares et s’est engagé à régler le capital social à hauteur de 69 euros / hectare ( 45 parts x 1,53 euros), soit la somme de 4.140 euros. Dès lors la CUMA n’est pas fondée à soutenir que le GAEC de [Adresse 4] a souscrit des parts pour un montant de 974.12 euros.
En conséquence, et alors que l’intimée n’allègue ni a fortiori ne démontre que le GAEC de [Adresse 4] n’a pas versé le montant relatif à la souscription des parts sociales, ce dernier est en droit, en application des statuts de la CUMA, d’obtenir remboursement de la somme de 3.165,88 euros déduction faite de la somme déja versée à hauteur de 974.12 euros.
Sur l’article 700 du code de procédure civile et sur les dépens
Le GAEC de [Adresse 4] doit supporter les dépens de première instance et d’appel comme la totalité des frais irrépétibles exposés. Il convient en revanche de laisser à chaque partie la charge de ses frais irrépétibles et de les débouter en conséquence de leur demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la première instance et en cause d’appel. Il convient en outre de confirmer le jugement déféré s’agissant des dépens.
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Déclare irrecevables les conclusions récapitulatives du GAEC de [Adresse 4] signifiées le 22 mai 2025 à 11h27 et la nouvelle pièce communiquée le même jour à 11h28,
Confirme le jugement sauf en ce qu’il a débouté le GAEC de [Adresse 4] de sa demande en paiement de la somme de 3.165,88 euros au titre du reliquat du remboursement des parts sociales,
Statuant à nouveau,
Condamne la CUMA des Chambarands Drômois à payer au GAEC de [Adresse 4] la somme de 3.165,88 euros au titre du reliquat du remboursement des parts sociales,
Ajoutant,
Déboute le GAEC de [Adresse 4] de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la première instance et en cause d’appel,
Déboute la CUMA des Chambarands Drômois de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la première instance et en cause d’appel,