Le preneur ou, en cas de cotitularité, tous les preneurs, qui, après avoir mis le bien loué à la disposition d’une société, ne participent plus aux travaux de façon effective et permanente, selon les usages de la région et en fonction de l’importance de l’exploitation, abandonnent la jouissance du bien loué à cette société et procèdent ainsi à une cession prohibée du droit au bail à son profit. Il en résulte que, dans ce cas, le bailleur peut solliciter la résiliation du bail sur le fondement de l’article L. 411-31, II, 1°, du Code rural et de la pêche maritime, sans être tenu de démontrer un préjudice.

Telle est la solution retenue par la Cour de cassation dans deux arrêts qu’elle a rendu le 12 octobre 2023.

Elle rappelle dans ces décisions que :

• selon l’article L. 411-35 du Code rural et de la pêche maritime, toute cession de bail est interdite, sauf si la cession est consentie, avec l’agrément du bailleur, au profit du conjoint ou du partenaire d’un pacte civil de solidarité du preneur participant à l’exploitation ou aux descendants du preneur ;

• selon l’article L. 411-37 du même code, le preneur, associé d’une société à objet principalement agricole qui met à la disposition de celle-ci tout ou partie des biens dont il est locataire, doit, à peine de résiliation, continuer à se consacrer à l’exploitation du bien loué mis à disposition, en participant sur les lieux aux travaux de façon effective et permanente, selon les usages de la région et en fonction de l’importance de l’exploitation ;

• selon, enfin, l’article L. 411-31, II, 1° et 3° du même code, le bailleur peut demander la résiliation du bail s’il justifie soit d’une contravention aux dispositions de l’article L. 411-35, soit, si elle est de nature à porter préjudice au bailleur, d’une contravention aux obligations dont le preneur est tenu en application de l’article L. 411-37.

Pour rejeter la demande de résiliation formée par la bailleresse pour cession prohibée, l’arrêt attaqué avait retenu que, si le preneur ne participe plus aux travaux de façon effective et permanente, l’existence d’une cession prohibée du bail au profit de l’EARL n’était pas établie.

En statuant ainsi, la cour d’appel, qui « n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations », a violé les textes susvisés, a jugé la Cour de cassation. Car, explique-t-elle, le preneur ou, en cas de cotitularité, tous les preneurs, qui, après avoir mis le bien loué à la disposition d’une société, ne participent plus aux travaux de façon effective et permanente, selon les usages de la région et en fonction de l’importance de l’exploitation, abandonnent la jouissance du bien loué à cette société et procèdent ainsi à une cession prohibée du droit au bail à son profit.

Il en résulte que, dans ce cas, le bailleur peut solliciter la résiliation du bail sur le fondement de l’article L. 411-31, II, 1°, sans être tenu de démontrer un préjudice.

LEXIS NEXIS

Cass. 3e civ., 12 oct. 2023, n° 21-20.212, FS-B