A R R Ê T

* * * * *

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur [F] [S] est inscrit comme entrepreneur individuel pour une activité de travaux de terrassement courants et travaux préparatoires qu’il exploite [Adresse 1] (64).

Il est par ailleurs le gérant de l’Exploitation Agricole à Responsabilité Limitée DE LA DIGUE (ci-après EARL DE LA DIGUE), immatriculée au registre du commerce et des sociétés du tribunal de commerce de Pau depuis le 17 mars 1992, ayant pour activité la culture de céréales (à l’exception du riz), de légumineuses et de graines oléagineuses et dont le siège social se trouve également [Adresse 1] (64).

Suite à la facture établie par Monsieur [H] [I] le 20 août 2018 à la suite de travaux d’épandage réalisés pour plusieurs agriculteurs à la demande de la société coopérative LUR BERRI et faisant mention pour Monsieur [S] de 12 650 kg de solution azotée sur 23 ha 85, la société coopérative agricole LUR BERRI, sise à [Adresse 4] (64), a émis une facture n° 27177 en date du 18 septembre 2018 d’un montant de 4 503,06 euros établie au nom de Monsieur [F] [S] pour ces travaux d’épandage de solution azotée 30.

Monsieur [F] [S] ne s’étant pas acquitté de cette somme, elle a établi plusieurs factures d’intérêts de retard pour lesquelles elle n’a reçu aucun règlement.

Suivant courrier recommandé avec accusé de réception en date du 18 janvier 2019, elle a tout aussi vainement adressé une mise en demeure d’avoir à payer les sommes réclamées, à Monsieur [F] [S] qui n’a pas retiré le pli recommandé.

Le courrier recommandé avec accusé de réception adressé le 26 mars 2019 à Monsieur [F] [S] par la société de recouvrement mandatée par la société coopérative LUR BERRI, n’a pas non plus été suivi d’effet.

Par requête en date du 22 mai 2019, la société coopérative LUR BERRI a saisi le tribunal d’instance de Pau aux fins d’obtenir une ordonnance portant injonction de payer à l’encontre de Monsieur [F] [S], mais par ordonnance en date du 27 août 2019, cette requête a été rejetée aux motifs de l’absence de bon de commande signé et d’autres éléments de preuve.

Elle a déposé une nouvelle requête auprès de la même juridiction le 26 mars 2020 qui a également été rejetée le 30 juin 2020 au motif qu’un débat contradictoire était nécessaire et qu’il appartenait à la société LUR BERRI de saisir la juridiction du fond.

Par exploit du 29 septembre 2020, la société coopérative LUR BERRI a fait assigner Monsieur [F] [S] devant le tribunal judiciaire de Pau, sur le fondement des articles 1103, 1193, 1104, 1231-1 et 1231-6 du code civil, aux fins de le voir condamner à lui verser :

– la somme de 4 503,06 euros assortie des intérêts aux taux légaux et contractuels de 9,5 % de retard à compter du 18 janvier 2019,

– la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts en application de l’article 1231-1 du code civil,

– la somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens en ce compris les frais de requête et d’huissier de justice,

– ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir.

Par jugement réputé contradictoire en date du 27 avril 2021, le tribunal judiciaire de Pau a :

– condamné Monsieur [F] [S] à payer à la société coopérative LUR BERRI la somme de 4 503,06 euros assortie des intérêts légaux à compter du 18 janvier 2019,

– condamné Monsieur [F] [S] à payer à la société coopérative LUR BERRI la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts,

– ordonné l’exécution provisoire de la décision,

– condamné Monsieur [F] [S] à payer à la société coopérative LUR BERRI la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné Monsieur [F] [S] aux entiers dépens.

Par déclaration du 15 juin 2021, Monsieur [F] [S] a interjeté appel de cette décision, la critiquant dans l’ensemble de ses dispositions.

Aux termes de ses dernières écritures en date du 06 octobre 2022, Monsieur [F] [S], appelant, demande à la cour, sur le fondement des articles 1101 et suivants du code civil et des articles 1241 et suivants du même code, de :

– infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 27 avril 2021 par le tribunal judiciaire de Pau, en ce compris les condamnations prononcées au titre de l’article 700 du code de procédure civile et au titre des dépens,

– débouter la société LUR BERRI de l’ensemble de ses demandes.

Y ajoutant :

– condamner la société LUR BERRI à verser à Monsieur [F] [S] la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts,

– la condamner à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– la condamner aux entiers dépens de première instance et d’appel.

Aux termes de ses écritures en date du 09 décembre 2021, la société coopérative LUR BERRI, demande à la cour, sur le fondement des articles 1101, 1313 et 1342-2 du code civil, de :

– confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Pau rendu le 27 avril 2021,

– débouter Monsieur [S] de l’ensemble de ses demandes,

– le condamner à la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de l’appel.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 18 janvier 2023.

MOTIFS

L’article 1353 du code civil dispose qu’il incombe à celui qui réclame l’exécution d’une obligation d’en rapporter la preuve, celui qui se prétend libéré devant réciproquement justifier du paiement.

Monsieur [F] [S] soutient que le véritable débiteur de la société coopérative est l’EARL DE LA DIGUE qui, comme d’autres agriculteurs, passe commande d’azote auprès de la société coopérative LUR BERRI, laquelle mandate Monsieur [H] [I] qui procède aux épandages sur les parcelles concernées et notamment celles exploitées par l’EARL DE LA DIGUE, et émet ensuite des factures directement auprès de la société coopérative LUR BERRI, à charge pour cette dernière d’établir sa facturation à l’ordre des agriculteurs concernés ; Monsieur [F] [S] explique que l’EARL DE LA DIGUE livre par ailleurs des céréales à la société coopérative LUR BERRI et que les règlements s’effectuent entre elles par compensation.

Il explique que depuis plusieurs années, la société coopérative LUR BERRI commet l’erreur d’émettre ses factures au nom de Monsieur [F] [S] aux lieu et place de l’EARL DE LA DIGUE et que pour rectifier cette erreur, elle émet un avoir et refacture la prestation à l’EARL DE LA DIGUE.

En réponse la société coopérative LUR BERRI dément l’existence d’une erreur de facturation en soulignant que Monsieur [F] [S] ne l’a pas prévenue de cette difficulté et qu’il ne conteste pas que la prestation d’épandage d’azote a bien été réalisée.

En l’espèce, il est établi par l’extrait K BIS versé aux débats que l’EARL DE LA DIGUE est immatriculée au registre du commerce et des sociétés du tribunal de commerce de Pau depuis le 17 mars 1992 et qu’elle a pour activité la culture de céréales, de légumineuses et de graines oléagineuses comme cela ressort de l’extrait du répertoire SIREN la concernant.

Il est par ailleurs établi que si le gérant de cette société est Monsieur [F] [S], lui-même exploite une entreprise individuelle de terrassement comme cela ressort de l’extrait du répertoire SIREN le concernant mais qu’il n’exerce pas l’activité d’agriculteur à titre personnel.

Il s’ensuit que les travaux d’épandage de solution azotée objets de la facture n° 27177 émise le 18 septembre 2018 par la société coopérative, concerne l’EARL DE LA DIGUE et non pas Monsieur [F] [S].

Monsieur [F] [S] qui n’avait pas constitué avocat en première instance, avait adressé le 11 novembre 2020, un courrier à la société d’huissiers de justice qui lui avait délivré l’assignation, en expliquant cette situation et en indiquant que les factures qui lui étaient réclamées ne le concernaient pas mais concernaient l’EARL DE LA DIGUE.

La société coopérative LUR BERRI sera dès lors déboutée de l’intégralité de ses demandes dirigées à l’encontre de Monsieur [F] [S].

Le jugement sera en conséquence infirmé en toutes ses dispositions, en ce compris les condamnations prononcées au titre de l’article 700 du code de procédure civile et au titre des dépens.

La société coopérative LUR BERRI, perdante, supportera les dépens de première instance et d’appel et sera tenue de verser à Monsieur [F] [S] une indemnité de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ; elle sera déboutée de sa demande à ce titre.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement par arrêt contradictoire et en dernier ressort, par mise à disposition au greffe,

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions, en ce compris les condamnations prononcées au titre de l’article 700 du code de procédure civile et au titre des dépens,

Statuant à nouveau et y ajoutant :

Déboute la société coopérative LUR BERRI de ses demandes dirigées à l’encontre de Monsieur [F] [S],

Condamne la société coopérative LUR BERRI à payer à Monsieur [F] [S] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Déboute la société coopérative LUR BERRI de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamner la société coopérative LUR BERRI aux dépens de première instance et d’appel.

Cour d’appel, Pau, 1re chambre, 11 Avril 2023 – n° 21/01990 Infirmation Répertoire Général : 21/01990